Analyses des matériaux : Connaissance des pierres, mortiers et décors peints
La caractérisation des matériaux est essentielle pour établir un état initial et envisager des solutions de restauration pérennes.
Caractérisation des pierres de tailles et moellons
Dans l’optique de déterminer l’origine des pierres et de proposer des pierres de substitution compatibles, notre laboratoire met en œuvre les essais suivants :
- étude pétrographique par observations microscopiques sur lames minces ;
- détermination de la masse volumique apparente et porosité (NF EN 1936) ;
- détermination de la vitesse du son (NF EN 14579) ;
- détermination de la résistance à la compression (NF EN 1926) ;
- observation en microscopie électronique à balayage pour la caractérisation des altérations et traitements de surface.
Les résultats obtenus permettent une comparaison de la pierre étudiée avec notre base de données et d’orienter la recherche de pierres compatibles dans le cadre de la restauration des maçonneries. Une comparaison d’aspect reste nécessaire avant choix définitif en fonction des bancs disponibles au moment des opérations.
Caractérisation des mortiers
Les mortiers de hourdage, joint, enduit, ragréage et stuc font l’objet d’une étude spécifique sur section polie en microscopie optique puis en microscopie électronique à balayage, avec analyseur chimique EDS. Ces analyses permettent l’identification des constituants (granulats, liants), ainsi que des potentielles pathologies les affectants (sels solubles, fissurations, carbonatation, etc.). En parallèle, ces matériaux peuvent faire l’objet d’une calcimétrie Bernard (dosage des carbonates), d’une attaque ménagée à l’acide chlorhydrique (recherche du rapport liant/charge), d’analyses granulométriques et d’analyses chimiques. Cette étude permet également d’orienter la formulation de mortiers similaire ou compatible à l’existant.
Caractérisation des décors peints
L’étude stratigraphique de couches picturales est effectuée par observations et analyses en microscopie électronique à balayage sur section polie afin d’identifier la nature des liants et pigments minéraux. L’analyse par IRTF et/ou pyrolyse/GCMS est nécessaire pour identifier la nature des composés organiques en présence (vinylique ou acrylique par exemple).
Intervention in-situ, conseils et suivi d’opération
Notre laboratoire intervient sur site pour l’aide au diagnostic dans le cadre d’étude préalable notamment, ainsi que pour l’assistance et l’accompagnement à la détermination des protocoles de restauration et leur contrôle. Nous réalisons des investigations et des tests in-situ ainsi que les prélèvements (carottages, microforages…) nécessaires aux diverses caractérisations effectuées en laboratoire.
Auscultation sonique
La détermination de la vitesse de propagation du son est une méthode non invasive et non destructive, permettant de caractériser la cohérence d’un milieu et de mettre en évidence la présence de discontinuités. Cette méthode est utile pour valider l’absence de fissures de certains objets présentant une configuration spécifique (gargouille en hauteur, déplacement d’objets sculptés de grande ampleur…).
Recherche de produit de surface
Des essais in-situ sont parfois nécessaires pour mettre en évidence la présence de produit de surface tels que des hydrofuges. Le test à la goutte permet visuellement de définir une potentielle « étanchéité » de surface tandis que l’essai à la pipette de Karsten permet de quantifier l’eau absorbée par unité de temps et ainsi définir un coefficient d’absorption de la zone testée.
Nettoyage
Dans le cadre de marchés spécifiques, notre laboratoire intervient pour accompagner les titulaires des lots Maçonnerie-Taille de pierre et Sculpture, lors des essais réalisés in-situ et évaluer l’efficacité des méthodes de nettoyage employées.
Les contrôles sont effectués par des observations des surfaces traitées, directement au microscope numérique de terrain et par des petits prélèvements recoupant à la fois les zones témoin comportant les salissures et les zones de tests repérées afin de procéder à des examens en laboratoire au microscope optique puis au microscope électronique à balayage. Ces examens ont pour but de visualiser de manière précise l’impact des traitements sur l’épiderme de la roche et ainsi de valider les paramètres conduisant à une efficacité maximale avec une innocuité pour le support.
Traitement biocide et anticryptogamique
La nature des colonisations microbiologiques de surface (espèces de mousses, micro-algues, lichens, champignons, bactéries, levures et/ou moisissures) est identifiée de façon à utiliser les produits biocides avec le spectre le plus opérant et le plus durable de façon à traiter efficacement dans le cadre des travaux à venir mais aussi de préconiser les traitements les plus efficients pour les phases d’entretien ultérieur.
Dessalement
Évaluation de la Contamination saline initiale et mesure de porosimétrie
L’extraction des sels solubles est réalisée selon le protocole ERM respectant la norme européenne NF EN 16455 : « Conservation du patrimoine culturel – Extraction et détermination de la teneur des sels solubles dans la pierre naturelle et les matériaux associés utilisés dans le patrimoine culturel ». Afin de rechercher les différentes associations salines possibles, les anions chlorures, sulfates et nitrates sont recherchés par chromatographie ionique, ainsi que les cations sodium, magnésium, potassium et calcium par ICP-OES. Ces associations peuvent être confirmées par une analyse minéralogique par diffraction de rayons X. En parallèle, une mesure de porosité par porosimétrie Hg sur la roche constitutive des parements permet d’adapter la composition des compresses de dessalement et d’établir un protocole de désalinisation.
Evaluation des opérations de dessalement
L’efficacité des travaux de dessalement est évaluée après diverses passes par des mesures sur prélèvements superficiels et sur les compresses (afin de quantifier les espèces retirées) et en ne suivant que les éléments chimiques présents en quantité notable lors de l’évaluation préalable.
Pré-consolidation et consolidation
La recherche de contamination saline et d’argiles gonflantes au sein du matériau à consolider sont réalisées en amont par notre laboratoire afin d’orienter le protocole de consolidation.
Ensuite, pour l’évaluation de l’optimisation de l’efficacité des traitements de consolidation, des tests d’optimisation du protocole de consolidation en fonction de la quantité, du mode d’application, de la dilution et du type de consolidant sont réalisés avec un contrôle de la pénétration du produit consolidant par des tests de coloration à la dithizone, du gain de dureté par test à la rayure, scotch test in-situ et rendu esthétique sur de petits prélèvements obtenus par carottage en petit diamètre (maximal 20 mm).
Certaines roches calcaires telles que le tuffeau peuvent faire l’objet d’une consolidation surfacique par biominéralisation. Ce procédé est en cours d’étude par notre laboratoire afin d’optimiser au mieux un protocole de restauration adapté.
Gestion de l’humidité et suivi microclimatique
Une des problématiques majeures relative à l’assainissement du bâti ancien est la gestion de l’humidité et des contraintes microclimatiques.
Caractérisation par prélèvements
Les mesures initiales et le suivi de l’évolution des teneurs en eau réelle des maçonneries sont effectués par microforage à profondeurs contrôlées et pesées selon la norme NF P94-050.
Cartographie de l’humidité des parements
La cartographie d’humidité des maçonneries par hygromètre capacitif puis reconstruction numérique par interpolation permet de déterminer de manière non invasive, la présence d’anomalies localisées sur les maçonneries auscultées. En combinaison avec les mesures de teneur en eau par prélèvement, ces données permettent d’avoir un aperçu complet de l’humidité et d’un éventuel assèchement en cas d’un suivi spécifique après pose d’un drainage notamment.
Contextualisation microclimatique locale
L’étude microclimatique consiste en une étude des variations climatiques à proximité de zones dégradées ou en cours de dégradation nécessitant une attention spécifique sur les phénomènes à l’origine de ces désordres. Des capteurs thermohygrométriques (Testo 175 H1, MSR) sont déployés et enregistrent toutes les 15 minutes les données de température et d’humidité au droit des zones à contrôler, combinés à un capteur dans l’édifice (données climatiques internes) et un capteur extérieur (données climatiques externes). Le traitement statistique des enregistrements permet la compréhension des dynamiques hydriques de l’édifice.